Autorisation d'urbanisme : l'illégalité de la lettre majorant le délai d’instruction est sans incidence sur la légalité de l'autorisation (revirement de jurisprudence)
Publié le :
23/11/2023
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L’article R 423-33 du Code de l’urbanisme fixe le délai de droit commun concernant l’instruction d’une autorisation d’urbanisme, à un mois pour les déclarations préalables, deux pour les demandes de permis de démolir et de construire portant sur une maison individuelle, et trois mois pour les autres demandes de permis de construire et pour les demandes de permis d'aménager.
Certaines situations prévues aux articles R 423-24 à R 423-33 du même Code permettent cependant de modifier ces délais, et les services sollicités pour la demande, l’autorité compétente disposant alors d’un nouveau mois pour indiquer au porteur du projet, le nouveau délai et, le cas échéant, son nouveau point de départ.
Par ailleurs, à défaut de notification d’une décision expresse dans le délai d’instruction, le silence gardé par l’autorité compétente vaut en principe, selon les cas, décision de non-opposition à déclaration préalable ou permis de construire, permis d’aménager ou permis de démolir tacite.
Dans le cadre de cette prolongation de délai, le Conseil d’État a été saisi le 24 dernier d’une question relative à la légalité d’un recours contre une majoration irrégulière du délai d’instruction, en réponse de laquelle il a opéré en un revirement de sa jurisprudence antérieure.
Dans cette affaire, un particulier avait déposé une demande de permis de construire en vue de régulariser la construction d’une serre agricole, et en réponse de cette demande, le maire de la commune où été implanté le projet, lui avait indiqué le 23 janvier 2018, que le délai d’instruction de sa demande était majoré d’un mois, et qu’en l’absence de réponse avant le 29 avril 2018, il bénéficierait d’une autorisation tacite. Or, un arrêté du 19 avril 2018 refusait au pétitionnaire le permis sollicité, entraînant de la part du particulier un recours en annulation de cette décision pour excès de pouvoir devant le Tribunal administratif, avec demande sous astreinte, de lui certifier qu’il est titulaire d’un permis de construire tacite.
Ses demandes rejetées tant en première instance qu’en appel, ne sont pas plus accueillies par le Conseil d’État.
Pour les sages, il résulte des dispositions rappelées en introduction qu’à l’expiration du délai mentionné par le Code de l’urbanisme « relatives à l’instruction des déclarations préalables, des demandes de permis de construire, d’aménager ou de démolir, naît une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite. Une modification du délai d’instruction notifiée après l’expiration du délai d’un mois prévu à l’article R*423-18 de ce code ou qui, bien que notifiée dans ce délai, ne serait pas motivée par l’une des hypothèses de majoration prévues aux articles R*423-24 à R*423-33 du même code, n’a pas pour effet de modifier le délai d’instruction de droit commun à l’issue duquel naît un permis tacite ou une décision de non-opposition à déclaration préalable. S’il appartient à l’autorité compétente, le cas échéant, d’établir qu’elle a procédé à la consultation ou mis en œuvre la procédure ayant motivé la prolongation du délai d’instruction, le bien-fondé de cette prolongation est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ».
Par conséquent, en l’espèce, la Haute juridiction administrative juge d’une part que la décision de refus de permis de construire ne trouve pas sa base légale dans la lettre du 23 janvier 2018, majorant le délai d’instruction de la demande du pétitionnaire, laquelle n’est pas une décision faisant grief susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, et n’est pas prise pour son application. La juridiction d’appel n’a ainsi pas commis une erreur de droit en écartant comme inopérant le moyen invoquant, par voie d’exception, l’illégalité de la lettre informant le porteur du projet de la majoration du délai d’instruction de sa demande.
Et d’autre part, la juridiction d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que le bien-fondé de la prolongation du délai d’instruction était par lui-même sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.
Par cette décision, le Conseil d’État abandonne sa position antérieure tendant à ce qu’une lettre majorant le délai d’instruction avait le caractère d’une décision faisant grief pouvant être déférée au juge de l’excès de pouvoir (CE du 22/10/1982, société Sobeprim, n°12522).
Arrêt du Conseil d'État du 24 octobre 2023, 2ème et 7ème chambres réunies, n°462511, Publié au recueil Lebon
Historique
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